Aujourd'hui comme d'autres fois ce n'est pas moi qui tiens la plume mais Pascale qui a joué les Tintin reporter et avec qui vous allez voyager et apprendre bien des choses... Direction donc la Champagne !
Comme je suis allée visiter les caves
de Besserat de Bellefon à Epernay, j’ai des choses passionnantes à
vous raconter !
On se contente parfois de considérer
ce vin prestigieux comme le symbole d’un moment festif,
l’accompagnement des apéritifs ou des desserts de fête, qu’on
boit sans vraiment y prêter attention, sans prendre le temps de lui
accorder l’attention qu’il mérite.
Je pense que le Champagne, c’est bien
plus que cela. En plus j’adore ça. Alors, j’ai envie de vous
faire partager ma passion pour ce vrai grand vin, qui peut
accompagner tout un repas si on choisit bien ses accords.
Et pour illustrer avec faste cette
petite exploration, je vais vous parler plus particulièrement de la
Cuvée des Moines de la maison Besserat de Bellefon, découverte avec
bonheur récemment! J’ai passé une journée entière à découvrir
le domaine à Epernay, dans la Vallée de la Marne.
La Champagne c’est où ?
Le vignoble se situe surtout en
Champagne-Ardennes, en Marne, Aisne et Haute-Marne, mais aussi sur
les départements voisins de l’Aube et de la Seine-et-Marne.
La Champagne viticole c’est une
mosaïque de 324 villages, des parcelles assez petites, la moyenne
est de 18 ares. Circuler dans la campagne champenoise, c’est
laisser le regard se perdre sur ces collines à perte de vue, le
moindre coteau de ce magnifique océan d’or vert étant couvert de
vignes.
Parmi les villages qui se blottissent
au pied des collines, 17 sont classés grands crus et 44 premiers
crus, qui sont privilégiés pour les Cuvées de Moines. Besserat de
Bellefon achète son raisin auprès des vignerons de 320 villages de
Champagne. Les Chardonnay, pour le Blanc de Blanc en particulier,
sont 100% issus de grands crus.
Le terroir est divisé en 4 grandes
régions : la montagne de Reims et la Vallée de la Marne, où
sont élevés les Champagnes les plus prestigieux (et les plus
chers), la côte des Blancs, et plus au sud, sur le département de
l’Aube et de la Haute-Marne, la côte des Bars.
Dans une région où le climat est
difficile, entre les gelées qui peuvent surprendre même en début
de printemps, les orages retenus par le relief, l’humidité, un
ensoleillement beaucoup moins généreux que dans les autres grandes
régions viticoles, bref, froid et humide, mais parfois il fait aussi
très chaud, on craint alors le stress hydrique, le manque d’eau
qui peut faire tomber les feuilles et affecter la maturation du
raisin… je salue l’imagination et la ténacité des vignerons,
œnologues, qui ont réussi à faire de ces terres un vrai trésor !
Quand on est face à l’immensité du
vignoble, on peut imaginer que selon l’exposition, le terroir, qui
passe d’argilo-marneux à calcaire, avec des variantes subtiles,
chaque cépage peut donner des jus très différents.
Quels sont les cépages autorisés en
Champagne ?
Les arguments dont ils disposent, ce
sont principalement trois cépages : deux noirs à jus blanc, le
pinot noir et le pinot meunier et un cépage blanc, le Chardonnay.
J’ai appris en discutant avec les
vignerons qu’il existe aussi d’anciens cépages très
minoritaires : l’arbane, le petit meslier, le pinot blanc et
le pinot gris (tous à raisins blancs) qui ont été abandonnés pour
des raisons de rendement, de maturité difficile à concilier ou de
goût peu adapté à celui des consommateurs, mais que certains
vignerons cultivent encore. Ils représentent une infime partie du
vignoble, mais sont autorisés dans l’appellation Champagne.
Dans la Vallée de la Marne, et donc
chez Besserat de Bellefon, le cépage roi, c’est le pinot meunier,
mon préféré ! Il est assez proche du pinot noir mais avec
plus de fruité, de rondeur, il se décline sur une multitude de
notes et donne des arômes secondaires super sympas, je trouve, ce
qui fait qu’il peut accompagner tout un repas !
Comme j’avais l’air de m’intéresser
à tout ça, me voilà dans les vignes avec mon seau, un sécateur et
des gants -sécurité oblige ! - je me suis fait embaucher
pendant un bref instant, juste pour la photo. J’avoue que je
n’étais vraiment pas aussi efficace que les cueilleurs à
l’ouvrage sur les rangées de meunier, toujours, à perte de vue !
Comment est né le Champagne ?
C’est en 1670 que Dom Pérignon, un
moine de l’abbaye d’Hautvillers, se voit confier la tâche,
plutôt sympathique, de gérer dix hectares de vigne, fruits de la
dîme des seigneuries voisines. Goûteur hors pair, il s’avère
grand œnologue, capable de déceler en goûtant un raisin le canton
qui l’avait produit. La légende lui prête l’invention du
Champagne, ce qui n’est pas tout à fait vrai : son vrai
mérite est d’être le premier à assembler différents cépages,
différents crus pour améliorer la qualité du vin et en faire
disparaître certains défauts.
Il voyage pour parfaire son savoir et
c’est en visite en Languedoc qu’il découvre la méthode de
vinification effervescente des vins de Limoux. Aussitôt rentré à
Hautvilliers, il expérimente cette technique sur les vins de
Champagne, avec le succès que l’on connaît. La légende lui prête
l’invention du bouchon de liège, maintenu par une ficelle de
chanvre huilée, le renforcement de la bouteille par un verre plus
épais pour éviter les explosions… mais tout cela reste très
empirique, et résulte probablement du travail de différents
acteurs, jusqu’à ceux de Pasteur sur la fermentation au XIXème
siècle.
Mais comment fait-on le Champagne ?
C’est un peu complexe, il faut ce
qu’il faut, mais passionnant !
Aujourd’hui, le principe de la
vinification du Champagne est la double fermentation du moût (le jus
après pressage), la première en cuves et la deuxième en
bouteilles.
D'abord, on presse !
Ce pressoir traditionnel m’a
impressionnée ! A l’ancienne, il peut presser 4000 kg de
raisins, en 5 à 7 passages : selon la quantité d’eau que
contient le raisin, il sera plus ou moins facile à presser.
Entre deux passages, il est remué, à
la pelle. Délicatement, attention ! Ici, on manipule le
Meunier, cépage roi de la maison, qui apporte la rondeur et le
fruité aux différentes cuvées. Sauf le Blanc de Blanc, bien sûr.
Puis c’est la première fermentation,
en cuves.
Pour certaines cuvées de prestige, la
première fermentation se fait en bois.
Après la première fermentation, on
procède parfois à une fermentation malolactique, où l’acide
malique se transforme en acide lactique, par l’intervention de
bactéries, ce qui a pour effet de limiter l’acidité.
Chez Besserat de Bellefon, on ne fait
pas de fermentation malolactique pour préserver la fraîcheur du vin
et donc sa vivacité.
On procède ensuite à l’assemblage
des un, deux ou trois cépages, de crus et de terroirs différents,
selon le résultat désiré par les œnologues et des chefs de caves,
un vrai puzzle qui demande une connaissance experte des différentes
cuvées de réserve conservées dans les caves.
Puis diverses manipulations pour
prévenir le « gerbage » qui fait perdre du vin au
débouchage, l’ajout de liqueur de tirage, et c’est parti pour la
deuxième fermentation en bouteilles, avec des bouchons en plastique
appelés « bidules » et fixés par des capsules comme
celles de la bière.
Cette deuxième fermentation, en caves
profondes, dure au minimum un an, trois ans pour les millésimés.
Chez Besserat de Bellefon, comme il n’y
a pas eu de fermentation malolactique, (pour ceux qui suivent) ce
vieillissement va durer beaucoup plus longtemps (5 ans !!!) pour
apporter la complexité et en faire des vins de garde.
Ensuite, on procède au « remuage » pour décoller de la bouteille les lies qui se sont formées pendant le vieillissement. Les bouteilles sont placées la tête en bas et tournées, d’un quart de tour tous les jours, à la main au début, mais le plus souvent mécaniquement de nos jours.
Ensuite, on procède au « remuage » pour décoller de la bouteille les lies qui se sont formées pendant le vieillissement. Les bouteilles sont placées la tête en bas et tournées, d’un quart de tour tous les jours, à la main au début, mais le plus souvent mécaniquement de nos jours.
Au bout de deux mois, les lies se sont
rassemblées contre la capsule.
On place alors les goulots dans un bain
de saumure à -25°, ce qui va figer le dépôt dans un glaçon. On
ôte alors la capsule et le glaçon et son dépôt sont expulsées
par les gaz, c’est le dégorgement. Le volume perdu est remplacé
par la liqueur d’expédition, un mélange de vins vieux et de sucre
qui constitue le secret bien gardé de chaque vigneron et qui donne
sa spécificité à ses cuvées.
C’est le dosage de sucre dans la
liqueur d’expédition qui fait que chaque Champagne sera brut, sec
ou demi-sec.
Chez Besserat, l’Extra Brut, sur une
base 2007, est très peu dosé, c'est-à-dire que la liqueur
d’expédition qui doit comporter au maximum 6 g de dosage pour un
extra-brut, n’en contient que 3 grammes et demi ici. Cela en fait
un champagne de grand caractère, aux arômes iodés et fumés, qui
s’allie magnifiquement avec des plats de poissons typés, qu’ils
soient dégustés chauds ou froids.
Pourquoi n’y a-t-il généralement
pas d’indication de millésime sur les bouteilles de Champagne ?
L’AOC champagne est la seule en
France à avoir le droit de mélanger des cuvées de plusieurs
millésimes, c’est pourquoi la plupart des Champagne n’ont pas
d’indication d’année. Les vins de réserve, conservés en cave
et parfois déjà assemblés, sont savamment dosés pour créer une
qualité suivie attendue par les consommateurs.
Quand les conditions météo annoncent
une année exceptionnelle, il arrive que l’on prévoie de réserver
la récolte pour un vin millésimé, qui sera une cuvée à part,
exceptionnelle, dans la production de la maison.
Chez Besserat de Bellefon, la cuvée
des Moines a présenté en 2007 son premier millésime 2000, puis une
nouvelle en 2002. Ces bruts millésimés sont élaborés
principalement à partir de grands crus et premiers crus ; ce
sont donc des vins plus riches, plus puissants, qui développent des
arômes secondaires, à l’instar de vins « tranquilles »
(sans bulles). Ce sont plus des vins de repas.
Les vins rosés et rouges tirent leur
couleur des peaux qu’on laisse macérer un certain temps au moment
de la première fermentation. C’est comme ça qu’on peut faire du
vin blanc avec des raisins noirs, il suffit de ne pas laisser les
peaux au contact des jus, so simple !
Blanc de blanc, blanc de noir,
qu’est-ce que c’est ?
Un champagne étiqueté blanc de blanc
est exclusivement composé de raisin blanc, donc 100% chardonnay. Le
Blanc de Blanc de la Cuvée des Moines a été mon préféré lors de
ces dégustations ! Il allie des arômes acidulés d’agrumes à
l’élégance de fleurs blanches dans un accord total où aucun ne
prend le pas sur l’autre. On a l’impression au contraire qu’ils
s’allient dans une harmonie parfaite qui là encore appelle
l’accompagnement d’un repas aérien !
Un champagne blanc de noir (surprenant
comme appellation au premier abord) est un jus blanc à base de pinot
noir ou de pinot meunier, ou d’un assemblage des deux, sans
macération des peaux.
Si on fait macérer les peaux, on
obtient du rosé, vu qu’il n’y a pas de pétillant rouge en
Champagne. Il y en a très peu en France d’ailleurs.
Le terroir, principalement
argilo-calcaire et marneux, n’était pas le plus simple à mettre
en valeur non plus ! Il en a fallu du savoir faire et de
l‘inventivité pour en tirer d’aussi subtiles nuances ! La
Côte des Blancs, où la craie affleure, est principalement plantée
de Chardonnay, le seul cépage blanc de Champagne, il y puise de la
vivacité, l’élégance et la délicatesse des fleurs blanches. Sur
la montagne de Reims, la craie est plus profondément enfouie, et
c’est le pinot noir qui règne en maître ; les coteaux sont
exposés au sud, et les jus seront ici plus charpentés, plus
puissants.
Comment commence l’aventure Besserat
de Bellefon ?
La maison est fondée en 1843, mais
c’est en 1930 qu’un défi est lancé à Victor Besserat par le
Directeur du Restaurant La Samaritaine de Luxe : « Préparez-moi
un vin de champagne suffisamment onctueux pour accompagner tout un
repas et je vous en commanderai 1 000 bouteilles au lieu de 100... »
C’est ainsi que naquit la Cuvée des
Moines, sur un défi remporté haut la main, et qui en a fait le
partenaire de la Haute Gastronomie.
En utilisant moins de liqueur de
tirage, la prise de mousse est plus légère, ce qui a été validé
scientifiquement par Gérard Ligier Bel-Air, spécialiste mondial de
la bulle, qui confirme que le Champagne Besserat de Bellefon a une
bulle 30% plus fine qu’une bulle ordinaire.
Cette légèreté et cette finesse se
sentent vraiment à la dégustation et lui donnent une saveur
crémeuse, c’est paradisiaque !
Si vous n’avez pas de détermination
arrêtée pour les fêtes, je vous conseille vraiment de tenter la
dégustation d’une de ces bouteilles, je suis à peu près certaine
que le plaisir ressenti vous entraînera vers les autres, sans doute
durablement.
Et si vous êtes un fidèle
inconditionnel d’une autre maison prestigieuse, essayez quand même,
et on en reparle ?
Bonnes fêtes !
Bonnes fêtes !
Mais pourquoi, vivement le prochain article de Pascale ! Est-ce que je vous raconte ça...
Merci d'avoir rappelé la visite de Dom Pérignon à Limoux, pas de Carcassonne où j'agite ! On en a un peu marre d'entendre toujours : "le champagne, premier vin effervescent de France" ! Mon œil !
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